La liaison ferroviaire Lyon-Turin de plus en plus contestée

La grogne monte contre la ligne ferroviaire Lyon-Turin, censée favoriser le ferroutage de part et d’autre des Alpes. Cette contestation qui s’étoffe ouvre, après l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes, une nouvelle ligne de front entre les écologistes et le gouvernement. Car François Hollande et Jean-Marc Ayrault entendent mener à bien, coûte que coûte, les deux chantiers, inscrits dans la politique de transport et d’aménagement du territoire.

Le chef de l’Etat français et le président du conseil italien, Mario Monti, devraient réaffirmer, à l’occasion du sommet France-Italie qui se tient à Lyon lundi 3 décembre, l’intérêt du projet transalpin.

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Le 28 novembre, lors du conseil des ministres, dans la continuité des engagements pris par Nicolas Sarkozy et le gouvernement de François Fillon, le ministre des affaires étrangères, Laurent Fabius, a annoncé un projet de loi “autorisant l’approbation de l’accord pour la réalisation et l’exploitation d’une nouvelle ligne ferroviaire Lyon-Turin”.

Les opposants – écologistes, associations de défense de l’environnement, agriculteurs et élus locaux – ont fait connaître leur détermination à bloquer le projet lors d’un “avant-sommet” qui s’est tenu vendredi et samedi à Lyon.

PLUS LONG QUE LE TUNNEL SOUS LA MANCHE

Le député européen José Bové, également très en pointe dans la bataille de Notre-Dame-des-Landes, et plusieurs élus d’Europe Ecologie-Les Verts devaient être présents.

Le Lyon-Turin est un chantier titanesque, plus long que le tunnel sous la Manche, et très complexe compte tenu du relief et de la géologie. Aujourd’hui, seuls 10 % des marchandises traversent les Alpes entre la France et l’Italie par le rail, contre 60 % en Suisse et 30 % en Autriche.

Les partisans du projet mettent donc en avant sa forte ambition environnementale qui permettra de réduire le trafic routier et ses nuisances. Tout en renforçant la sécurité.

Les “anti” qu’ils soient français, suisses ou italiens, tentent de fédérer leurs forces. Les Français devaient ainsi recevoir le soutien de leurs homologues italiens, plus virulents, qui comptent manifester lundi à Lyon et dont plusieurs militants étaient bloqués à la frontière samedi matin.

“SUSPICION DE CONFLIT D’INTÉRÊTS”

Globalement, ils réclament des mesures préalables, comme en Suisse, où le transport routier a été fortement taxé, et estiment que la ligne historique, celle qui passe par le tunnel du Mont-Cenis est suffisante pour assurer le fret, en forte diminution. Ils dénoncent “les désastres environnementaux”, et plus précisément “les conflits d’intérêts et les rapports douteux” ainsi que les coûts “exorbitants ” du futur tunnel.

Le député (UMP) de Savoie et maire d’Aix-les-Bains, Dominique Dord, a ainsi exprimé son doute sur “les informations officielles sur lesquelles nous fondons nos raisonnements et nos décisions”, allant jusqu’à évoquer une “suspicion de conflit d’intérêts au sein même de la commission d’enquête publique.

Lancé lors d’un sommet franco-italien en 1991, le projet est aussi un casse-tête financier. Le coût du tunnel dit “de base” entre l’Italie et la France, a été d’abord évalué à 8,5 milliards d’euros. Mais, selon la Cour des comptes qui a adressé, en août, à Jean-Marc Ayrault un référé sur le projet, les “coûts prévisionnels sont en forte augmentation”.

L’estimation du coût global est passée de 12 milliards d’euros, en comptant les accès au tunnel côté français, à “26,1 milliards d’euros”. Et de regretter que “d’autres solutions alternatives moins coûteuses ont été écartées sans avoir été explorées de façon approfondie”.

IL FAUT AUSSI INVESTIR DANS LES TRAVAUX D’ACCÈS

L’Elysée et le gouvernement sont conscients du problème que représente le financement du projet, surtout en période de recherche d’économies. A Lyon, François Hollande devrait appeler l’Union européenne au secours et lui demander de maximiser son financement. Soit 50 % du coût des travaux préparatoires et 40 % des travaux définitifs. Rien de sûr. L’allocation de ces sommes dépend du futur budget européen 2014-2020, lui aussi soumis aux lois de la rigueur. Sans ces engagements, avance-t-on au gouvernement, “il sera impossible de conclure”.

Outre le financement du tunnel lui-même, il faut aussi investir dans les travaux d’accès et la mise en cohérence du schéma de transport, notamment le contournement du Grand Lyon.

Des milliards d’euros qui reposeront sur l’Etat français et les collectivités territoriales. Si les partisans du projet, conscients du problème financier, veulent dissocier les deux étapes du projet Lyon-Turin, beaucoup reconnaissent qu’elles sont complémentaires et indispensables à la cohérence globale. Une partie des enquêtes d’utilité publique sur ces travaux “franco-français” est en cours.

Les opposants entendent bien batailler ferme à cette occasion. La mise en service du tunnel, prévue pour 2023, pourrait être repoussée à 2028-2029.

La liaison ferroviaire Lyon-Turin de plus en plus contestéeultima modifica: 2012-12-01T13:42:00+01:00da davi-luciano
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